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Perles de Kiffa

Les perles de Kiffa qui proviennent de la région du même nom, au Sud-Est de la Mauritanie. Elles furent fabriquées pendant un laps de temps assez court, à savoir du XVIIème au début du XXème siècle (LSD). Ce sont des perles en verre dont la pâte a été pilée en poudre et recompactée (le cœur de la perle est appelé "l’âme"). Cette pâte est ensuite modelée en triangle ou en sphère ou autre selon la forme voulue, appliquée sur un brin d’herbe qui préservera par la suite le trou d’enfilage.

 

Les perlières maures les décorent ensuite en appliquant d’autres pigments extraits de fragments de verre ou d’autres perles (dont notamment des millefiori italiennes ou par la suite nord-européennes).

 

Les pâtes reconstituées à partir de ces poudres et de gomme arabique (ou de salive) sont ensuite appliquées sur le cœur de la future perle, à l’aide d’os polis ou d’autres ustensiles (aiguilles).

 

C’est ainsi que les femmes perlières dessinaient les signes et autres motifs composant les perles. Les plus anciennes d’entre elles (XVIIIème et XIXème siècles) sont reconnaissables à la finesse et à l’abondance de leurs motifs. Les perles plus récentes (début XXème siècle) portent des motifs moins fins.

 

Les perles, une fois décorées par les femmes maures, sont cuites dans un petit four de leur fabrication. C’est le moment le plus délicat, car la cuisson doit être parfaite et à une température maîtrisée pendant les 40 minutes que dure l’opération.

 

La perle subit ainsi un glaçage qui permet juste la fusion des décors sur l’âme. Elle est ensuite légèrement polie pour avoir son aspect brillant (là encore, cette technique semble s’appliquer davantage aux perles de ce début de siècle qu’à celles du siècle dernier).

 

Pour ce qui est de la signification de ces symboles, il faut savoir que la perle de Kiffa relève exclusivement du monde des femmes et que ces dernières ont mis un point d’honneur à conserver leurs secrets.

 

« De tout temps, les perles, en plus de leur valeur esthétique, ont eu un pouvoir magique. Elles devaient protéger le porteur du mauvais œil. Or, le bon œil protège du mauvais. Ainsi la forme triangulaire viendrait d’une représentation stylisée de cet œil » (MFD).

 

« Les motifs et les couleurs renforcent le pouvoir d’une perle. Dans les kiffas polychromes, on retrouve des yeux (les ronds ou les triangles bleus) entourés de zigzag. Ces derniers représenteraient le chemin de l’eau courante ou de la vie... » (MFD)

 

Nous savons davantage à quoi correspondent les différentes couleurs utilisées dans la conception des perles :

- le gris : couleur du verre pilé sans pigment, rappellerait l’ivoire de "la molaire d’une servante", symbole de sa santé rustique

- le blanc : une pure jeune fille

- le jaune : symbole d’affabilité

- le bleu : la bénédiction du ciel

- le rouge : les vertus du corail méditerranéen.

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Les couleurs et les formes s’associent pour augmenter leurs pouvoirs :

- le cercle bleu : l’infini universel

- le cercle vert : l’espoir, la richesse

- le cercle rouge : l’amour

- le cercle jaune : le soleil.

 

La forme triangulaire ainsi que la régularité des motifs géométriques (dans le cas des "kiffas" polychromes) renvoient à l’esthétisme islamique défini dès les premiers siècles de la religion.

 

La perle pyramidale découle de ces mêmes références mystiques. Mais il existe aussi des perles rondes ainsi que tubulaires.

 

Il résulte qu’aujourd’hui, ce savoir-faire s’est presque perdu et que les nouvelles perles dites de Kiffa, confectionnées en cette fin de millénaire pour des raisons strictement commerciales, n’ont plus grand chose à voir avec leurs aïeules.

 

Mais comment ne pas penser aux générations de femmes qui ont porté, aimé, donné en cadeaux, vendu ou troqué ces perles ! Elles leur ont donné vie. Et ces vieilles perles continuent aujourd’hui à exister à travers nous... Mais demain ? Où seront-elles quand nous ne serons plus ?... Là réside peut-être toute l’humanité de ces perles et de leur magie.

 

 

Références bibliographiques

 

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